version en ligne | désinscription | mettre à jour le profil
‌
‌
‌
Joutier Philippe

«Tout jeune plongé dans une cité
reçoit une poussée de haut en bas
égale au volume de police qu’il déplace
»

Entretien avec Philippe Joutier, auteur de Les Extrafrançais aux éditions Dualpha, préface de Philippe Randa.

(Propos recueillis par Fabrice Dutilleul)

Pour en savoir plus sur les livres de l'auteur
‌
‌

‌ Illus. Racailles

Philippe Joutier raconte son expérience dans les -banlieues appelées difficiles (un euphémisme !) ou zones de non-droit (une discrimination !), dites aussi jungles (franchement désagréable !) ou simplement nommées par leur numéro départemental (absolument méprisant !). Ce monstre périurbain a en effet de multiples gueules, toutes plus hideuses les unes que les autres : chômage, trafics, racisme, désespoir, chantage, machisme, utopies politiques, obscurantisme religieux…

Philippe Joutier
‌
‌
Extrafrançais

Quel rôle exact avez-vous joué dans les banlieues difficiles ? Celle d’un missionnaire au service de la République française ?

Missionnaire ? Serait-ce à dire que l’administration ne serait plus laïque ? Je persifle ! Reste que la laïcité reste en effet un enjeu fort de l’air du temps. La puissance publique, ou devrais-je dire l’impuissance publique, État et collectivités, sont écartelées entre la volonté de sauvegarder nos valeurs fondamentales et le refus de vouloir les imposer au nom de l’égalité culturelle et du « Tout se vaut ». Et à défaut d’oser trancher une fois pour toute sur ce qu’il conviendrait d’exiger en matière d’immigration ou d’intégration, on continue de s’auto flageller en espérant qu’à force d’en rajouter dans l’expiation post-coloniale, les populations concernées, émues par tant de contrition, finiront par nous en être reconnaissantes. À force de leur dire qu’on les aime, elle finiront bien par nous rendre cet amour.

Qu’est-ce qui vous aura le plus marqué durant ces deux décennies passées au Ministère de la Jeunesse et des Sports, au service de la « Politique de la Ville » ?

D’abord l’antagonisme paradoxal entre deux options : celle de pallier le chômage en s’accommodant de la petite délinquance et celle de la contenir en s’accommodant de la religion ! Mais aussi l’absurdité et plus encore cette impuissance lucide. Car personne n’est dupe. La police fait jouer les jeunes au foot la journée et les course la nuit. Absurdité lorsque, par de fières déclarations, ceux qui n’y vivent pas, expliquent qu’il faut reconquérir les quartiers ou les centres ville en y ramenant des populations qui n’aspirent qu’à en sortir. Absurdité lorsque les rebeus qui galèrent pour obtenir des diplômes avec l’espoir de s’en arracher, y sont réintégrés par la force du chômage et du faciès, au nom du modèle social et de l’exemplarité. Absurdité lorsqu’on assoit la citoyenneté sur les valeurs républicaines modèle 1789 dans un monde où la citoyenneté est aujourd’hui fondée sur la pub, le matérialisme et la consommation. Absurdité lorsqu’on prétend combattre le communautarisme en subventionnant des actions communautaires, fêtes de quartiers et couscous party ! Absurdité lorsqu’un professeur d’histoire tente de justifier son enseignement avec un exemplaire du Coran traduit en français sur son bureau pour prévenir les objections de ses élèves ; impuissance lucide enfin, lorsque des dealers construisent sur le trottoir en été une piscine gonflable sur leurs points de vente pour se rafraichir et que l’État, ne sachant pas trop quoi faire, mais sentant bien qu’il doit réagir, décide d’en contrôler… l’eau !

Pour obtenir le livre « Les Extrafrançais»
‌
‌
Illus. Racailles voiture police

L’action de l’État, avec ou sans karscher, apparait impuissante dans le tableau que vous dressez…

Elle l’est. Ceci dit, gardons-nous de jeter le bébé avec l’eau du bain : nous restons malgré tout dans un État de droit. Mais cela deviendra de plus en plus difficile dans les années qui viennent. Les sociétés sont par nature criminelles. Ce sont celles qui tentent encore de résister à la corruption qui constituent l’exception. Et la tentation deviendra de plus en plus grande.

Quel est votre regard sur la classe politique ? Et quel autre sur les populations locales ?

Je ne me veux surtout ni magister, ni moralisateur ! Comme les populations locales ou chacun d’entre nous, la classe politique est évidemment d’abord centrée sur elle-même et ses intérêts propres. Ce n’est pas propre à la France. Son rejet vient simplement du fait qu’elle prétend nous faire croire le contraire. La martingale gagnante est de rassurer l’électeur à partir d’un programme consumériste et au moyen de la pub.

Pour obtenir le livre « Les Extrafrançais»
‌
‌
Illus. Policiers

Du même auteur, chez le même éditeur

Les Extrafrançais, préface de Philippe Randa

Les corruptions religieuses, préface de Florianne Jeannin

L’information truquée et la fabrique du prêt-à-penser

Gourou, je te like

Tous nos livres sont sur www.francephi.com
‌
‌
Vous avez reçu ce courriel car vous vous êtes inscrits à FrancePhi Diffusion avec l'adresse . Si vous ne souhaitez plus recevoir de courriels de notre part, cliquer sur désinscription.
FrancePhi BP 20045 53120 Gorron
© 2025 FrancePhi Diffusion, Tous droits réservés.
‌