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Pourquoi n’avez-vous pas évoqué le Maroc et la Tunisie, et accordé dans votre livre une large part à l’Algérie ? Le Maroc et la Tunisie n’ont jamais été des colonies françaises, mais des royaumes qui existaient de longue date. Ces deux pays, et notamment le Maroc, furent pratiquement les seuls à avoir une histoire stable parmi tous les pays d’Afrique. Ils ont fait l’objet d’accords entre les gouvernements respectifs et la France pour que cette dernière assure un protectorat basé initialement sur la sécurité interne, condition essentielle de la mise en valeur. Le royaume du Maroc, pour sa part, a été fondé en 788 par Idriss 1er, et depuis cette création, a toujours conservé une certaine autonomie. Le Maroc, malgré sa promesse de neutralité faite à la France en 1832, prit parti pour l’Émir Abdel-Kader lors de la conquête de l’Algérie. Il fut militairement battu par le maréchal Bugeaud après la bataille d’Isly et le traité de Tanger en 1844. Il fut pacifié dans les décennies suivantes notamment par le général Lyautey jusqu’au traité de protectorat de 1912, laissant l’autorité théorique au sultan Moulay Youssef. Plus récemment, l’histoire de la Tunisie se stabilise au XIVe siècle avec la fondation de la dynastie des berbères Mérinides. Bien que les siècles suivants fussent plus chaotiques notamment avec l’invasion de l’Afrique du Nord par les Turcs, le pays conserva une relative autonomie. Il n’en fut pas de même pour l’Algérie… En effet : ce vaste territoire appelé « la Régence d’Alger » fut arraché aux Turcs en 1830. L’Algérie fut créée de toutes pièces par les Français qui lui attribuèrent ce nom en 1837. Initialement colonie, elle fut administrativement changée en 1881 en territoire français composé de trois départements et rattachés au ministère de l’Intérieur en 1896. L’Algérie est une création française : j’en veux pour preuve parmi tant d’autres le constat de Ferrat Abbas, futur ardent défenseur de l’indépendance, évoqué par Youssef Girard, docteur en histoire, dans L’Entente du 23 février 1936 : « Si j’avais découvert la “nation algérienne”, je serais nationaliste… Et cependant je ne mourrai pas pour la “patrie algérienne”, parce que cette patrie n’existe pas. Je ne l’ai pas découverte. » Pourquoi avez-vous décrit les OPEX ? La politique coloniale ayant eu comme objet initial l’éradication de l’esclavage et des maladies endémiques, on admettra quand même que les États colonisateurs envisageaient à court terme un intérêt économique, qui ne fut d’ailleurs jamais réalisé, hormis par quelques investisseurs privés. La colonisation passait par la mise en sécurité des populations colonisées, ce qui fut réalisé. Mais à l’accession à l’indépendance, les dirigeants, incapables d’assurer la sécurité intérieure ou extérieure de leur pays, firent appel à la France. Afin de garantir la stabilité des pays et la sécurité des populations menacées par la réapparition des luttes interethniques et l’extension de l’islamisme au Sahel, la France, liée par son passé colonial, et, il faut bien le dire aussi, par quelques intérêts économiques, donna suite aux requêtes des chefs d’État qui avaient sollicité son intervention. L’envoi de troupes françaises débuta pratiquement au lendemain de l’accession à l’indépendance et perdure encore de nos jours. 773 familles françaises ont été endeuillées par les opérations extérieures (OPEX), dont la majeure partie en Afrique, pour assurer la paix dans ses anciennes colonies et la sécurité de leurs populations. La désinformation autour de la repentance, Philippe de Parseval, Éditions Dualpha, 230 pages, 29 euros.
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