Vous écrivez avoir voulu « rendre hommage à l’un des officiers les plus marquants de l’armée française »… C’est-à-dire ? J’ai considéré que le lieutenant-colonel Masselot était l’un des officiers les plus marquants de l’armée française, parce qu’il fut un chef au courage exceptionnel, admiré et adulé par ses hommes, qu’ils soient soldats de métier, quand il s’agissait de légionnaires, mais aussi appelés du contingent, quand il a commandé le 18e Régiment de chasseurs parachutistes. Ses victoires sur le terrain, ses bilans, ses blessures au combat, ses citations et décorations furent parmi les plus emblématiques de l’armée française au cours de la IIe Guerre mondiale, puis de celles d’Indochine et d’Algérie. Rappelons simplement qu’au cours de ses trente et une années de carrière militaire, le lieutenant-colonel Masselot aura reçu trois blessures au combat, quinze citations, dont dix à l’ordre de l’armée, et que ses titres de chevalier, officier et commandeur de la Légion d’honneur, le seront à chaque fois à titre exceptionnel. Mais Georges Masselot avait aussi ces sautes de caractère qui ont nui à son avancement et au déroulement de sa carrière.
« Coups d’éclat » et « coups de gueule » semblent avoir jalonné la carrière de cet officier ; cela n’a pas dû rendre son parcours des plus facile ? Le personnage m’intéressait peut-être parce que, comme moi, il était pied-noir. J’ai donc fait des recherches et j’ai découvert un officier au caractère bien trempé, capable de réaliser le meilleur sur le terrain, mais capable du pire avec ses supérieurs, comme la fois où il déclara publiquement à propos de l’un de ses chefs de corps qu’un « cornichon à croix de Lorraine était incapable de commander des légionnaires au combat. » Malgré ses nombreux coups d’éclat, ses « mouvements d’humeur » et ses coups de gueule l’ont empêché de faire la carrière à laquelle il aurait pu prétendre. Enfin, Georges Masselot était un homme d’Honneur, c’est pourquoi en 1961 il a refusé de se parjurer en abandonnant les populations européennes et musulmanes qu’il avait juré de défendre, ce qui l’a amené à participer au putsch du 22 avril. Révolte qui fut suivie sans état d’âme par ses paras, appelés du contingent pour la plupart, qui se battaient pour la défense de l’Algérie française. Révolte qui l’a mené devant les tribunaux gaullistes qui le condamnèrent à huit ans de prison. Pour bâtir votre livre, vous vous êtes appuyés sur de nombreux témoignages d’amis et de compagnons d’armes de Georges Masselot… Quels ont été les plus surprenants ? Tous les témoignages recueillis furent unanimes pour décrire un grand soldat. Ses compagnons d’armes comme ses amis et les membres de sa famille lui vouaient une très grande admiration et beaucoup de respect. Ayant moi-même rencontré et beaucoup discuté avec Georges Masselot, le plus surprenant fut certainement l’explication, pleine de discrétion, qu’il m’a donnée sur sa carrière : « Somme toute, rien d’extraordinaire pour un officier qui aimait son métier et avait refusé de se déshonorer. »
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