Description
Quand on aime Antoine Blondin – et comment pourrait-il en être autrement –, on croit tout savoir de lui. On se trompe. La preuve, ce livre d’Alain de Chantérac qui est un voyage au bout d’une amitié commencée il y a plus de trente ans.
Un paladin, c’est-à-dire un chevalier courageux et généreux, Blondin ? Sans aucun doute. Mais aussi un troubadour, un joyeux compagnon, drôle, taquin et volontiers provocateur. Par petites touches, Alain de Chantérac brosse le portrait d’un « blessé de la vie » qui, derrière les excès publics, cachait une belle âme.
« Le problème avec la postérité, c’est qu’il faut mourir », disait Blondin. Il a donc fini par tirer sa révérence. Sans s’éloigner jamais de nos cœurs. Le voilà de retour. Tel qu’en lui-même. Au sortir de ce livre, de l’espèce amoureuse, on n’a qu’une envie. Celle de dire : « Garçon, remettez-nous ça ! »
Alain de Chantérac est né en 1958. Il a fait ses études à Paris au début des années 80. C’est à cette période qu’il a rencontré Antoine Blondin, plus particulièrement au cours de ses pérégrinations nocturnes. Il réside depuis 1986 à Toulouse où il dirige un cabinet de conseil en transmission d’entreprises, quand il ne joue pas au golf.
« Le Cercle d’un poète disparu.
Il flotte dans l’air comme une nostalgie d’Antoine Blondin. À l’approche des 25 ans de sa disparition – le 7 juin prochain –, ses amis ont déjà mis le couvert. Des livres lui rendent hommage, un documentaire sera diffusé lors du Tour de France pour célébrer celui dont les chroniques dans L’Équipe atteignirent des sommets. Les convives ne seront pas très nombreux. L’auteur des Enfants du Bon Dieu, de Monsieur Jadis ou d’Un singe en hiver n’a jamais figuré dans les programmes officiels. Trop imprévisible, trop léger, trop dissipé, celui que Bernard Frank qualifia avec quelques autres de « hussard » avait une fâcheuse tendance à se moquer des professeurs qui prenaient l’existence trop au sérieux.
Il faut « regarder les choses en farce », plaidait-il. Il préférait l’amitié aux honneurs, le panache à l’ambition, l’insouciance à la raison. Il écrivait pour recoudre les morceaux d’une vie sourdement partie en lambeaux : “Très vite, confie-t-il, il m’est apparu que je serais moins un romancier d’aventures que de mésaventures.”
Sa prose est pleine d’élégance, de fantaisie, de pirouettes. Jouant avec les mots, il polit ses phrases comme du verre, laissant entrevoir en transparence, sous la buée de l’ironie, des tragédies intimes. Il jongle avec la douleur, parle avec tendresse aux paysages. Ce sont des compagnons de (dé)route : “Un arbre étriqué, les branches levées comme d’un vieillard qui se peigne, ramenait ses mèches parcimonieuses d’un seul côté de la lumière.”
Resté aussi maigre que son œuvre, il promène entre ses lignes sa tristesse « farceuse », son désespoir « allègre ». De tous ses romans s’échappe, comme d’une fenêtre grande ouverte, une poignante et souriante mélancolie. S’il aperçoit le bonheur, c’est qu’il est déjà en train de s’enfuir : “Après la Seconde Guerre mondiale, les trains recommencèrent à rouler. J’en profitais pour quitter ma femme et mes enfants.”
Il distribue les images comme des fleurs, mais ne peut s’empêcher de les disperser. C’est un gamin à qui l’existence a volé ses jouets. À l’égal d’Henri Calet, auteur qu’il affectionnait, il aurait pu s’exclamer :“Ne me secouez pas, je suis plein de larmes. » Ces larmes furent la seule eau qu’il accepta de mettre dans son vin. Vingt-cinq ans après, par un juste retour des choses, son œuvre s’est bonifiée” » (Bertrand de Saint Vincent, Le Figaro).