Description
Préface de Nicolas Bonnal
Visions et amertumes
Dans les années 70, on évoquait au lycée un mage, un gourou, un écrivain qui sortait des catégories traditionnelles et scolaires, mais n’entrait pas dans les nouvelles. Il faisait douter de la réalité du monde, de nos perceptions, et de notre humanité limitée à la consommation et à la perception d’informations. En outre, il était perçu comme le prophète d’un futur effrayant et qui était déjà là. Bref, il était un oracle. Si Fiodor Dostoïevski, Edgar Poe ou Honoré de Balzac nous décrivaient un éternel présent qui venait du passé, cet écrivain mythique nous décrivait un éternel présent qui venait du futur. On le jugerait comme prophète et non comme styliste ou « réaliste ».
Beaucoup considéraient Philip K. Dick comme un génie réservé à une minorité choisie. On citait surtout Ubik dont le nom résonne comme celui d’un dieu de l’étrange. Après des essais de lecture infructueux, de nombreux lecteurs finirent par découvrir ce monstre littéraire en 1982 grâce au film Blade runner. Échec commercial à sa sortie, cet opus fasciné (et pas seulement fascinant) devint ensuite le film-culte par excellence. Les puristes reprochèrent plein de choses à une œuvre qui dessinait les grands traits de notre époque mondialiste, dystopique et travaillée par l’image. L’altération de la réalité par les simulacres était là, tout comme la technologie dangereuse, la difficulté de définir l’homme dans le monde capitaliste unifié et la fabrication artificielle par les images d’une mémoire collective planétaire effaçant l’expérience individuelle.
Cependant, la lecture de Philip K. Dick demeurait pour beaucoup difficile. Il fallut attendre d’autres films – Total recall, Paycheck, Minority report – pour avoir une idée plus précise de cet univers « riche et étrange », digne des visions de Shakespeare et du baroque Don Quichotte. Le futur dystopique, la dégradation d’un paysage planétaire déglingué et surtout la fabrication d’une mémoire artificielle me semble être des axes essentiels des écrits de l’auteur. Et c’est là qu’intervient avec passion Tetyana Popova-Bonnal qui a relu ou lu tous les ouvrages de Philip K. Dick susceptibles d’expliquer l’étrange réalité dans laquelle nous sommes plongés. Depuis un an, nous avons en effet assisté à une accélération de cette réalité marquée par le totalitarisme technologique et l’effondrement énergétique/économique ; tout cela grâce au virus et aux mesures comme ce reset qui l’accompagne, sorti de cerveaux planétaires et dangereux. Bref, nous sommes rentrés au moins dans les grandes villes dans l’univers de Philip K. Dick – un univers souvent comique et menaçant, comme dit notre auteur.
Tetyana Popova-Bonnal a compulsivement a déniché les textes oubliés ou peu lus qui dessinent la réalité prévue par notre étrange prophète. Mais en bonne chrétienne, elle a aussi insisté sur les contenus spirituels et « chrétiens-primitifs » de l’œuvre de Philip K. Dick, dimension que beaucoup de critiques ont négligée ou oubliée. De ce point de vue, ce grand auteur pourrait être aussi un écrivain du « 8e jour » quand nous serons réveillés du long sommeil impérial et ferré. Ce livre s’adresse donc à une élite « éveillée », et qui s’ignore encore.
Du même auteur
aux éditions Dutan
La poésie patriotique ukrainienne à travers les âges, préface de Nicolas Bonnal
aux éditions Dualpha
Philip Kindred Dick et le grand reset, préface de Nicolas Bonnal